Pour les habitants du Nord-Est parisien et d’au-delà, le Canal de l’Ourcq est de nos jours avant tout un lieu de loisir et d’agrément. On y vient pour se promener ou faire du sport sur ses berges, pour prendre l’apéro ou écouter un concert sur l’une des péniches amarrées sur ses quais, sur le canal proprement dit. Bref, de quoi nous faire oublier qu’à l’origine, la fonction de ce canal, il y a plus de 200 ans, était tout à fait différente.
@bonjourpantin Le canal de l’Ourcq est indéniablement l’atout charme du 19ème et de Pantin. Vous connaissez ses terrasses, ses pistes cyclables et ses bateaux électriques… mais connaissez-vous son histoire ? Alors venez, avec Simon on vous emmène ! #canaldelourcq #bassindelavillette #canauxdeparis ♬ son original – Bonjour Pantin
En fait, la raison d’être originelle du canal de l’Ourcq, c’est d’améliorer l’approvisionnement de Paris en eau potable. Au tout début du 19e siècle, Napoléon Bonaparte, qui n’est encore que premier consul, se rend compte que la capitale souffre d’un problème au niveau de l’eau potable, c’est-à-dire qu’elle est en quantité insuffisante, mais elle aussi d’une qualité qui laisse profondément à désirer.
Et donc, le premier consul va réactiver un projet dont les premières traces remontent carrément au XVIème siècle, figurez-vous, c’est-à-dire acheminer jusqu’à Paris l’eau de la rivière Ourcq. Le projet peut paraître un peu saugrenu dans la mesure où l’Ourcq prend sa source à quelques 100 km de Paris, mais on a depuis longtemps établi que la déclivité était satisfaisante, donc on va pouvoir acheminer l’eau simplement par gravité, que le débit de l’Ourcq était satisfaisant. Et puis comme c’est une rivière qui n’arrose aucune localité importante, son eau est de bonne qualité, on ne pouvait pas en dire autant à l’époque de l’eau de la Marne ou a fortiori de la Seine.
Donc un décret est voté en 1802 et les travaux commencent dans la foulée. Napoléon décide de les confier à Pierre-Simon Girard, un ingénieur en qui il a toute confiance dans la mesure où Girard a fait partie des scientifiques qui l’ont accompagné quelques années auparavant lors de la désastreuse expédition d’Egypte. Mais les travaux d’aménagement du canal vont prendre 20 ans, de telle sorte que quand il est inauguré en 1822, Napoléon n’est pas là pour jouir du spectacle.
Suivant ce système, le bassin de la Villette, que vous avez jusqu’ici et qui s’apparente un peu au terminus de ce canal, il avait une fonction de réservoir à partir duquel les eaux de l’Ourcq, après filtrage étaient dispatchées à travers deux très grandes canalisations en fonte, l’une partant en direction de la Bastille, l’autre en direction de la Plaine-Monceau. Et depuis ces deux grandes canalisations, vous aviez tout un tas de ramifications qui alimentaient en eau non pas tous les immeubles, on n’en est pas encore là à cette époque, mais en tout cas toutes les fontaines publiques où on pouvait donc avoir de l’eau potable en continu, ce qui était une amélioration tout à fait notable. Mais dès l’époque napoléonienne, on comprend bien que ce canal de l’Ourcq serait beaucoup plus intéressant s’il était navigable, s’il pouvait accueillir des activités commerciales et du transport de marchandises.
Mais ça implique évidemment qu’il ne soit pas en cul-de-sac au niveau du bassin de la Villette. Et c’est pourquoi, dans la foulée, on décide de le connecter à la Seine en créant d’une part le canal Saint-Denis et d’autre part le canal Saint-Martin. L’ensemble de ce réseau est terminé et livré en 1825.
Autant dire que là encore, Napoléon n’en verra jamais les termes. Et c’est le moment où les berges du canal vont s’urbaniser fortement, mais accueillir notamment beaucoup d’entrepôts et d’usines. Dans Paris intra-muros, il n’en reste pas grand-chose aujourd’hui, mais vous pouvez encore admirer derrière moi les magasins généraux.
Ces deux entrepôts ont été construits autour de 1850. Celui de droite, vous voyez, est encore largement dans son jus. Il accueille notamment la base nautique.
Celui de gauche a été victime d’un incendie en 1990. Il a été reconstruit, vous le voyez, dans un style beaucoup plus contemporain, mais néanmoins respectueux de la volumétrie, on va dire, originelle. Et il accueille de nos jours notamment une auberge de jeunesse.
Alors qu’en est-il quand même de la navigation sur le canal de l’Ourcq de nos jours ? Et bien contrairement à ce qu’on pense souvent, ces 11 premiers kilomètres, ou ces 11 derniers comme on veut, c’est-à-dire entre Paris et les Pavillons-sous-Bois en Seine-Saint-Denis, sont toujours ouverts à la navigation commerciale. Ça correspond à ce qu’on appelle la section à grand gabarit, c’est-à-dire qui est assez large, pour accueillir des péniches de belles dimensions.
Donc une péniche par exemple peut parfaitement arriver de Rouen, remonter la Seine, emprunter le canal Saint-Denis et puis arriver du côté de Pantin ou de Bobigny. Pour ce qui est de la navigation de plaisance, sachez qu’on peut remonter jusqu’à Port aux Perches. Alors à Port aux Perches, vous êtes dans le département de l’Aisne.
Vous êtes en rase-campagne et vous êtes à 108 km du bassin de la Villette. Si l’aventure vous tente, il faudra juste être un petit peu patient puisque pour les parcourir, avec une vitesse limitée à 6 km/heure et pas moins de 10 écluses à franchir, il faudra compter autour de 20 à 21 heures de navigation.