Qui se cache derrière les rues de Pantin ? Édouard Vaillant, révolutionnaire de l’ombre

par Ève Guiraud
L’avenue Édouard Vaillant est l’une des artères principales de Pantin. Si son tracé fait écho au passé industriel de la ville et témoigne aujourd’hui de ses nombreuses mutations, son nom rend lui hommage à un personnage historique dont l’influence sur le paysage politique français reste encore méconnu.

Cette longue rue, l’une des principales de la ville de Pantin, a abrité pendant vingt ans l’usine de la chocolaterie Perron, l’un des fleurons de l’activité industrielle pantinoise de l’époque. Commencant son parcours à la Mairie pour le finir à l’orée du quartier des Quatre Chemins, l’avenue Édouard Vaillant traverse aujourd’hui de nouveaux lieux emblématiques du renouveau culturel de la ville, comme le tiers-lieu La Cité Fertile et l’espace Jacques Brel, ainsi que des vestiges du passé, à l’instar des Bains-douches municipaux de Pantin.

Le personnage qui a donné son nom à la rue reste lui bien méconnu au regard de son parcours et de l’influence qu’il a pu avoir sur l’histoire politique française, notamment en participant activement à la création du Parti Socialiste en 1905. Le parcours militant d’Édouard Vaillant commence cependant bien avant : en parallèle de ses études d’ingénierie et de médecine, il s’intéresse de près aux travaux de grands penseurs révolutionnaires comme Karl Marx et Auguste Blanqui, dont l’influence se fera ressentir tout au long de sa carrière politique, et adhère notamment à l’Association internationale des travailleurs.

Mais c’est sa participation active à la Commune de Paris à partir de 1870 qui marquera le plus son engagement militant. Édouard Vaillant participe à l’insurection dès ses débuts et devient même l’un des élus du Conseil de la Commune, s’investissant tout particulièrement dans l’instruction publique et le développement de l’école pour tous. Progressiste et fervent défenseur de la laîcité, il milite notamment pour la suppression de l’enseignement religieux à l’école et l’amélioration de l’éducation des filles. Devenu l’un des principaux dirigeants de la Commune à moins de trente ans, cette expérience révolutionnaire galvanisera et influencera l’action politique de ce socialiste convaincu.

Si ces projets de réformes avant-gardistes furent malheureusement compromis par l’anéantissement rapide de la Commune, Édouard Vaillant n’en sera en effet pas moins déterminé à poursuivre ses idéaux socialistes et à défendre la cause des travailleurs. Pilier du Parti Socialiste français aux côtés de Jules Guesde et de Jean Jaurès, il militera notamment pour la réduction du temps de travail et l’instauration de la journée de huit heures, l’indépendance des syndicats, et surtout l’amélioration de la protection sociale pour les travailleurs, en posant les bases de ce qui deviendra plus tard la Sécurité Sociale. Profondément anticolonialiste, il fut aussi l’un des élus les plus critiques envers la politique colonialiste française et dénoncera inlassablement la violence des répressions coloniales en Tunisie et au Maroc.

Contrairement à certains de ses acolytes restés célèbres comme Jean Jaurès, Édouard Vaillant ne laisse derrière lui que très peu de traces de son parcours. Homme discret, peu porté sur les grands discours ou l’écriture de mémoires, l’ampleur de son engagement politique suffit largement cependant à le considérer comme l’un des pionners inconstestables de la République sociale et laïque que nous connaissons aujourd’hui.

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